Antibes historique

Quelques évÚnements historiques et autres histoires.

Antibes, ville militaire, ville de pêcheurs, ville épiscopale, a donc une longue histoire, et comme toujours, les longues histoires sont peuplées de petites histoires parfois dramatiques, tantôt drolatiques, faisant intervenir des gens de toutes conditions, mêlant vie publique et vie privée, petites gens et grands de ce monde.

Voici quelques unes de ces histoires, toutes liées au passé de notre ville.

Antibes. Musée des plans-reliefs. Hôtel des Invalides à Paris.

OĂč une fuite permet l'arrivĂ©e de l'eau Ă  Antibes !

Il est difficile d'imaginer aujourd'hui que, par le passé, Antibes ait eu à souffrir du manque d'eau. Les Romains, grands bâtisseurs, avaient construits deux aqueducs afin d'assurer l'approvisionnement en eau de la cité qui a pu compter jusqu'à 30 000 habitants. L'aqueduc de la Bouillide et l'aqueduc de Fontvieille amenaient une eau abondante et de bonne qualité. Puis, au fil des siècles, la ville s'est repliée sur elle même, et les aqueducs ont été oubliés. Il ne restait plus qu'une source pur fournir l'eau aux 4 000 Antibois. Cette source dit Fontvieille (de font, source et vieil, ancienne, vieille) fut équipée d'un puits auquel était affecté un gardien, entretenu par la communauté. Puis, ce puits a laissé sa place à une fontaine qui est toujours là. Heureusement, le sous-sol était riche en eau, ce qui est attesté par les nombreux puits présents dans les caves du vieil Antibes.

Puis, en 1773, la municipalité qui souhaitait développer l'activité économique de la ville, décida qu'il fallait restaurer l'ancien aqueduc romain de la Fontvieille. Les travaux furent confiés à M. d'Aguillon, sous-brigadier des armées du roi et ingénieur de son métier. Mais alors que les travaux débutaient à peine,des difficultés apparurent. Non pas des problèmes techniques que M. d'Aguillon était tout à fait capable de résoudre, mais des obstacles administratifs. Pour parler simplement, on lui mit "des bâtons dans les roues". En effet, le maire Lombard de Roquefort avait un frère, Louis, qui était ingénieur du roi à qui il aurait bien aimé confier les travaux de restauration.

Les mésaventures de Monsieur d’Aguillon furent exposées par son neveu, Camille d’Aguillon, et rapportées par M. Léon Drouyn (Actes de l’Académie Impériale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux. Paris, 1860)
«Monsieur d’Aguillon, ayant commencé à explorer l’aqueduc sur huit cent toises (environ 1500 m), demanda que la municipalité lui alloue une somme de 1500 livres afin qu’il puisse continuer ses recherches. La somme lui fut refusée, et il se résolut à abandonner son projet. Mais un habitant de la ville, qui souhaitait que le projet se réalise (aujourd’hui, on appellerait ça une fuite, mot qui, dans cette affaire, pourrait faire sourire), fit lire à M. d’Aguillon un procès-verbal daté de 1772, comportant des erreurs, concernant l’état de l’aqueduc, dressé par un dénommé Fabre, un obscur ingénieur hydrolicien, à la demande du maire de l’époque, Monsieur Guirard, et qui avait reçu pour cela, une somme de 1200 livres. Après lecture de ce procès-verbal, la nouvelle administration municipale qui venait d’être mise en place, décida de voter les 1500 livres demandées par M. d’Aguillon afin qu’il poursuive ses recherches, puis vota 24000 livres sur les 72000 livres nécessaires pour effectuer les travaux de restauration. La somme restante, soit 48000 livres, serait prise en charge moitié par les états de Provence et moitié par le gouvernement.»

La fontaine dite Fontvieille. Aquarelle de Linette Cordier.

Juan-les-Pins devait s'appeler Albany-les-Bains.

C’est le 12 septembre 1881 que la banque Antoine Rigal de Cannes, dirigée par Léon Rigal fils du fondateur, s’associe avec messieurs Signoret et Vidal (futur maire de la ville) pour constituer la « Société Foncière de Cannes et du Littoral », dont le duc d’Albany était simple actionnaire. Ils souhaitaient créer une station de villégiature entre Golfe-Juan et le Cap. Ils rachetèrent alors tous les terrains en bord de mer, entre ces deux lieux, dont le plus important propriétaire était Alexandrine Emond d’Esclevin, veuve de M. Charles Agard, propriétaire du Château de la Pinède, dont le domaine couvrait 30 hectares, en bordure de mer. Son fils François vendit la totalité de la propriété pour la somme de 850.000 francs. Parmi les actionnaires les plus importants de la société, en dehors de ceux déjà cités, on trouvait : Mrs Robert Soleau, conseiller municipal et futur maire, le Prince d’Essling, duc de Rivoli.
Recherchant un nom pour cette station, ils optèrent pour Albany-les-Bains, afin honorer le plus prestigieux d’entre eux. Mais le malheureux duc d’Albany n’eut pas le temps de s’en réjouir, car il glissa sur le plancher de tuiles du Cercle Nautique où il se trouvait en se blessa au genou. Souffrant d’hémophilie depuis l’âge de 2 ans, il mourut le 28 mars 1884 à 2 heures du matin, d’une hémorragie cérébrale dans la villa Nevada.
De grosses difficultés financières apparurent liées à la faillite de la banque Rigal en 1884. Un liquidateur judiciaire fut nommé en la personne de Paul Négrin dans le but de vendre les vingt-deux hectares achetés par la société. 

Mais le projet ne fut pas abandonné. En 1884, la municipalité antiboise dirigée par monsieur Vidal avait décidé d’abandonner le nom d’Albany-les-Bains en décidant que cette station, située prés de Golfe-Juan et riche en pins, devait s’appeler Juan-les-Pins.
 En 1895, on comptabilisait à Juan-les-Pins 47 villas. Ce nombre passa à 92 en 1903. En 1894, il y avait 4hôtels prêts à accueillir les touristes : l’Hôtel de la gare, l’hôtel Terminus, Le Grand-Hôtel de Juan-les-Pins tenu par MM. Richard et Garcin, propriétaires des hôtels Thermal et Britannique à Aix-les-Bains, et la Réserve construit en 1891.
Cette station nouvelle plut à Maupassant qui put écrire : « La fumée d’un train court sur la rive allant de Cannes à Juan-les-Pins qui sera peut-être, plus tard, la plus jolie station de toute la côte.» (Maupassant, Sur l’eau)

La statue du Poilu.

Antibes peut s’enorgueillir d'avoir un stade ayant accueilli un match de quart de finale  de la Coupe du monde de football. C'était en 1938 pour le match Suède-Cuba qui se termina en faveur de la Suède sur un score de 8 à 0. Ce grand stade pour l'époque, inauguré en 1927, pouvait recevoir jusqu'à 15 000 spectateurs. Il était dominé par l'imposante statue du "Poilu" haute de 7 mètres, destinée à honorer les 261 antibois morts pour la patrie pendant la grande guerre de 14-18, la municipalité dirigée alors par le maire Baptistin Ardisson (voir ce nom), décida, lors de la délibération du conseil municipal en date du 29 août 1922, de lancer une souscription afin d’ériger un gigantesque monument aux morts. Les nombreux dons s’ajoutèrent aux fonds votés, ce qui permit de lancer le projet.
L’architecte choisi, M. Louis Eugène Copello, définit le projet en composant un monument formé d’une plaque fixée contre le mur de soutènement du tombeau de Championnet surmontée d’une statue représentant un poilu.
On choisit un sculpteur habitué aux monuments grandioses, M. Henri Bouchard qui s’attela à la tâche. Le monument fut inauguré le 8 juillet 1927 devant un stade comble.

Une rumeur voulut que le sculpteur se soit suicidé en s’apercevant que sa statue portait son arme à gauche. Elle était alimentée par le fait qu’un sculpteur lyonnais du nom de Lemot s’était effectivement suicidé après avoir oublié de placer les étriers sur la statue équestre de Louis XIV qu’il venait de livrer. Bouchard, lui, n’avait pas fait d’erreur. Il avait voulu signifier que ce monument était destiné aux soldats qui avaient passé « l’arme à gauche ». Après une période trouble pendant la guerre, il mourut simplement dans son lit le 30 novembre 1960 à l’âge de 85 ans.

 

Le stade du Fort Carré et la statue du Poilu un jour de Coupe du monde de football en 1938. Editions Munier.

Inauguration du stade du Fort-Carré par le président de la République Paul Deschanel le 6 avril 1920. Edition Levy et fils.

La catastrophe de l'hydravion transatlantique.

Si vous laissez vos pas vous mener jusqu'au port, vous pourrez voir sur le mur de la Courtine, à côté de la grande porte marine, côté port, se trouve apposée une plaque commémorant un évènement tragique survenu le 19 mai 1937, qui endeuilla la construction aéronavale d’Antibes.

Une base aérienne marchande avait été installée à Antibes en 1920. Celle-ci prit peu à peu de l'importance. Elle assurait le service d'hydravions pour Ajaccio.

Le 19 mai 1937 vers 16 heures, le prototype d'un nouvel hydravion, le LeO H-47, conçu pour le transport de fret et de passagers, décolla du plan d’eau d’Antibes pour un vol d’essai préliminaire à sa mise en service sur les lignes commerciales de l’Atlantique sud, avec dix personnes à son bord. Lors d’un décollage laborieux, l’aile toucha l’eau, l’avion plongea dans les flots, et la coque se déchira. Cinq personnes trouvèrent la mort dans l’accident : le pilote d’essai Bourdin qui comptait plus de 4000 heures de vol, Luc Brochet, second maître mécanicien, Charles Rayer, mécanicien navigant, Marcel Juin, contrôleur à la direction du matériel et Robert Blouin, chef de service radio, les deux derniers appartenant à la compagnie Air France.

Les obsèques des victimes se déroulèrent le 22 mai 1937, au pied du bastion Saint André en présence d’une foule considérable. Le cortège partit du port, franchit la porte marine, gagna le Front de Mer par la rampe des saleurs, puis se dirigea jusqu’au square des Poilus (actuel jardin Albert 1er) où eut lieu la cérémonie célébrée par Mgr Rémond, évêque de Nice. Celui-ci apprit aux parents des victimes qu’au moment de l’accident un vicaire, qui regardait le vol de l’appareil du haut des remparts, put donner l’absolution aux malheureux occupants de l’appareil.
On ne retrouva jamais les corps de Bourdin, Brochet et Blouin. La plaque de marbre portant les noms des victimes fut installée près de la porte marine et fut bénie par le curé Delor le 18 septembre 1937, lors d’une cérémonie organisée en leur mémoire ainsi qu’en souvenir des victimes du naufrage du « Pourquoi-Pas- ? » du commandant Charcot).
Un monument réalisé par le sculpteur Marcel Bouraine fut érigé à la pointe de la Gravette et inauguré en 1938 en présence du maire Jules Grec. Il représentait une aile d’avion s’enfonçant dans les flots. Ce monument fut détruit pendant la guerre, abandonnant la charge du souvenir à la seule plaque de marbre de la porte marine.

Une occasion ratée pour Antibes.

On reproche souvent aux Antibois de se méfier des Étrangers. Je ne sais si c'est une affirmation exacte, mais cette méfiance leur a joué un tour en cette année 1834, lorsque s’arrêta devant la grille du Château Salé, un personnage qui allait révolutionner la région. Il s’agissait de Lord Henry Peter Brougham , né le 17 septembre 1778 à Edimbourg, âgé alors de cinquante-six ans, membre de la Chambre des Lords, dignitaire franc-maçon, qui venait de démissionner du poste de chancelier du gouvernement de lord Grey. Voulant se rendre à Nice pour y passer l’hiver avec sa fille malade, il avait été refoulé par les douaniers sardes alors qu’il s’apprêtait à franchir le Var, en raison d’un risque épidémique. Le comte Hilarion de Cessole, Président de la Cour de justice du sénat de Nice avait alors ordonné des mesures draconiennes envers tout ce qui venait de Provence, afin de protéger le pays niçois de l’épidémie de choléra qui sévissait en Europe.
Lord Brougham cherchant un lieu de villégiature, s’arrêta à Antibes et on lui indiqua le château Salé. Il se rendit sur les lieux et en fit appeler le propriétaire M. Baliste qui avait acheté le château en 1792. Ce dernier se montra tellement exigeant quant au montant du loyer que Lord Brougham fit demi-tour et partit à Cannes pour passer y la nuit. Le lendemain, il retourna au Château Salé non plus pour le louer, mais pour l’acheter. Il tomba d’accord sur le prix avec le propriétaire, mais ce furent les antibois qui protestèrent, ne voulant livrer la maison qui avait abrité le séjour de Napoléon Bonaparte, à un anglais. Lord Brougham, dépité, retourna donc à Cannes où il fit construire en 1835 le château Éléonore. Il y resta trente ans et y mourut le 7 mai 1868, après avoir provoqué la transformation de ce petit port de pêcheur de 4 000 âmes en station de tourisme d’hiver.

Et Antibes resta pendant encore plusieurs décennies, une petite bourgade de pêcheurs et de paysans, entourée par ses murailles.

The Lord Brougham and Vaulx.

Le château Salé à Antibes

Le mystĂšre des amants inconnus. L'express du 7 juin 2007

Quelle ne fut pas la surprise des ouvriers chargés de la démolition de l’arsenal, en 1930, lorsqu'ils mirent à jour deux squelettes, dont l’un s’avéra être celui d’une femme. L'autopsie révéla également que les malheureux avaient été trucidés à l’arme blanche, dague ou poignard. Deux versions s’affrontèrent. 
En 1582, bien avant la construction de l’arsenal, se dressaient un couvent et une chapelle, propriétés de l’ordre des Cordeliers, proches des Franciscains, dont les Frères recevaient, se murmurait-il alors, des visites galantes... dont celle d’une jeune femme, très belle, surprise par un mari jaloux, alors qu’elle était en confession très intime. Fou de rage, le mari bafoué aurait tué femme et amant avant de faire disparaître les corps et d’affirmer que, découverts, les coupables s’étaient enfuis. 
C’est encore une histoire d’adultère qui dicte la deuxième version.
En 1870, l’arsenal était placé sous le commandement du colonel d’artillerie Raymond, marié à une très jolie femme de trente ans sa cadette. Un beau jour, la femme disparut en même temps qu’un jeune sous-officier qui fut porté, lui déserteur ! « Avec la femme du colonel », affirmèrent les mauvaises langues. Le colonel, humilié, accrédita pourtant lui-même cette thèse et demanda sa mutation. De là à penser qu’il aurait pu supprimer les coupables et organiser leur disparition, il n’y a qu’un pas que d’aucuns ont vite franchi.

Le couvent des Cordeliers qui deviendra le grand arsenal.

Musée des plans-reliefs

La table Saint-Roch.

Peu de gens, sauf quelques vieux Antibois, se souviennent de ce petit édifice situé dans l’anse Saint-Roch, à quelques mètres du rivage a aujourd’hui disparu, enfoui sous les aménagements du port de plaisance. C'était un des points de repère lorsque les élèves de l'école Saint-Joseph, dont je faisais partie, allaient faire du sport au Fort-Carré. Aucun d'entre nous ne savait exactement ce que c'était, mais c'était là, point final. On disait que c'était "romain", sans plus. Plus tard, je me suis posé des questions, je me suis renseigné auprès d'archéologues compétents. Pour eux, il s’agissait probablement d’un petit temple du type "fanum à cella", c’est-à-dire un temple possédant une pièce où était installée la statue du dieu que l’on a tôt fait d’identifier à Neptune étant donné la situation du temple sur les quais du port. A moins que la partie centrale ne soit tout simplement que le socle d’une statue monumentale, peut-être celle de Neptune.
Une question reste en suspens : Quelle était l’utilité de l’eau que Clergues découvrit lorsqu’il brisa une dalle. Provenait–elle de l’aqueduc saint Michel dont on cherche encore les substructures ? Venait-elle d’une rsource souterraine ? Toujours est-il que la découverte d’un fort courant d’eau douce à cet endroit laisse perplexe et reste à ce jour sans réponse.
L’agrandissement de la photo permet de préciser l’agencement de l’édifice. La partie centrale, carrée, mesure environ 5 m de côté et était alors la seule partie à dépasser de l’eau. Elle était entourée d’une enceinte de 13 m de côté formant un deambulatorium, c’est-à-dire un espace plan permettant de faire le tour de l’édifice central.  Les travaux sous-marins effectués auraient permis de retrouver des bases de piliers ainsi que des colonnes et de nombreux débris.
L’obligation d’effectuer rapidement les travaux du port ne permit pas de poursuivre l’inventaire de cet important site archéologique.

La Table Saint-Roch, photo prise par J. H. Clergues.

Agrandissement d'une photo aérienne des années 1920-1930 montrant nettement la structure de la Table Saint-Roch.

La Fontaine du Pin à Antibes. La légende de Sarah et Martel.

S'il est des lieux chargés d'imaginaire à Antibes, celui-ci en fait clairement partie. Lorsqu'un visiteur se rend sur place, il cherche bien sûr à trouver la fameuse fontaine. Or il s'agissait d'une source qui s'écoulait entre les rochers du rivage à laquelle les marins venaient s'abreuver. Le rivage a été modifié, et la source n'est plus accessible. Existe-t-elle encore ? Un petit oratoire avait été construit à côté d'elle. Il a aussi disparu.

A proximité, se trouve le "Port du Croûton". Il ne s'agit bien sûr pas de pain rassis dont il s'agit. Ce terme oriente vers deux étymologies. Soit issu de crousta, ce que semblerait attester l'accent circonflexe sur le U, désignerait un terrain couvert d'une croûte dure. Issu de croutoun, il pourrait faire référence à une cave voutée ou à la présence d'une grotte. A cet endroit se trouve un petit port, le port du Croûton. Un petit port de pêche, même si aujourd'hui, il offre 350 anneaux pour de petits bateaux. Autrefois, on l'appelait "Port des galères turques". Bizarre ! Cette dénomination est surprenante, car l’étroitesse du port ne permet pas d’imaginer qu’une flotte ait pu y faire relâche. Il parait plus probable que lors de l’alliance entre François Ier et Soliman le Magnifique, les galères turques ne pouvant mouiller dans le port d’Antibes, vinrent faire relâche au large de ce  port, et utilisaient cet accès au rivage pour faire commerce avec les autochtones. Un document célèbre qui se trouverait au Palais Topkapi à Istanbul, illustre la présence des Turcs dans les eaux antiboises. Ce dessin réalisé par Nasuh Matrakçi en 1543, représente Antibes de curieuse façon. Une inscription nous donne le but de leur présence: "Ich-bou kal'é-i Antibè gelub voussoul bouldouk". Pour ceux qui ne connaissent pas le turc, voici la traduction : "Nous prîmes la direction d'Antibes, et y arrivâmes." Il étaient donc en mission officielle avec l'escadre de Barberousse.

 

La légende de Sarah et Martel.

Les légendes sont souvent enracinées dans l'histoire locale, mêlant choses réelles et imaginaires. Celle-ci ne fait pas exception à la règle. Cette histoire trouve son fondement dans la peur que faisaient régner les Sarrasins qui pratiquaient des raids dévastateurs sur la Provence.
A cette époque, paraît-il, une bonne fée régnait sur Antibes et protégeait les habitants contre la haine des Musulmans. Un jour, elle réunit de jeunes antibois, tous mâles et leur fit promettre, en usant d’on ne sait quel sortilège, de ne jamais aimer de femme tant que leur pays ne serait pas débarrassé de la menace sarrasine. Le non-respect de leur serment entraînerait pour eux les plus grands dangers.
Quelque temps après, il se trouva que certains jeunes antibois furent faits prisonniers par les barbaresques. Parmi eux, un certain Martel, guerrier franc. Pendant sa captivité, il tomba amoureux de la fille d’un chef musulman, la belle Sarah. Ce fut le coup de foudre, l'ivresse irrépressible qui emportât le souvenir du serment que Martel avait prêté. Ayant réussi à s’échapper, les jeunes antibois décidèrent tous de rejoindre l’armée qui combattait en Provence. Seul Martel, aveuglé par son amour, refusa. Sarah et Martel prirent l’habitude de se retrouver à l’abri dans les rochers, en ce lieu que l’on appelle aujourd’hui « La Fontaine du Pin ».
Un soir, alors qu’ils étaient tendrement enlacés, un tourbillon les arracha de terre, et toujours enlacés les précipita dans les flots où ils disparurent à jamais. La fée apparut alors sous l’aspect d’un ectoplasme pour disparaître immédiatement à tout jamais.
Pendant longtemps, les Antibois racontèrent que, de temps en temps, la fée revenait hanter les lieux et que l’on pouvait voir une ombre blanche planer au dessus de la Fontaine du Pin.

Editions P. L. Maillan.

Le Port du Croûton. Edition Rostan et Munier.

La légende des faux-monnayeurs du Cap d'Antibes

A cette époque, un jeune marin, prénommé Francis séduisit une jeune antiboise, née de parents génois, répondant au prénom d’Hélène. Dans la douceur d’un soir d’été, elle se promenait sur les remparts à la recherche d’un peu de fraicheur, pensant à son bien-aimé parti sur les flots. Soudain, son attention fut attirée par des voix qui montaient du pied des remparts : une voix d’homme et une de femme ; et cette voix d’homme la fit sursauter : c’était la voix de Francis qu’elle croyait au loin, sur son bateau. S’approchant, elle entendit quelques mots comme "souterrain", "cap". Se penchant par-dessus les remparts, elle vit deux ombres se séparer alors qu’une voix de femme disait : « Adieu Francis ! » La pauvre Hélène crut défaillir ; son amour, celui à qui elle avait tout donné, avait abandonné son cœur à une autre. Elle envisagea un moment de se jeter par-dessus les vieux remparts pour mettre fin à sa douleur. Se raisonnant, elle se précipita chez elle, prit son chien, un petit épagneul que lui avait offert Francis, et partit sur les traces de celui qui l’avait trahie.
Après une heure de marche sur des chemins difficiles, semés d’embuches, le chien s’arrêta au milieu de grands rochers : le chemin, jusque là incertain, s’arrêtait net face à la falaise. Ils étaient arrivés à l’extrême pointe du cap et le chien avait perdu la trace de son maître. Hélène s’assit, désespérée, quand elle entendit un bruit venant d’une ouverture située à quelques mètres au-dessus d’elle. Grimpant sur les rochers coupant comme des rasoirs, elle découvrit une entrée de grotte dans laquelle elle se faufila. Elle assista alors à un spectacle qu’elle n’aurait pu imaginer quelques instants auparavant. Au centre d’une salle creusée dans le roc et réunis autour d’une fournaise, se trouvaient plusieurs hommes torse nu, faisant fondre divers métaux que d’autres hommes écrasaient à coup de marteaux pour en faire des lingots de fer, de plomb et de cuivre. Et parmi ces hommes, se trouvait Francis. Elle crut défaillir, mais elle fut ramenée à la réalité par les aboiements de son chien qui avait reconnu son maître, ce qui attira l’attention des faux monnayeurs qui se précipitèrent sur elle et allaient la tuer quand Francis, reconnaissant sa bien-aimée, se précipita et la prit dans ses bras. Se saisissant d’une hache, il jura de tuer le premier qui s’approcherait d’elle. La situation devenait extrêmement tendue quand soudain, venant du fond de la salle, une voix puissante se fit entendre et un colosse roux apparu. C’était le chef des brigands qui affirma faire confiance à Francis, tout en lui demandant des explications. Ce fut Hélène qui s’exécuta et expliqua comment elle avait découvert leur cache. Les brigands acceptèrent de lui faire confiance, mais exigèrent que l’on sacrifie le chien qui pourrait amener d’autres curieux jusqu’à eux.
Quelques temps plus tard, la cachette des faux monnayeurs fut découverte et ils furent arrêtés. Francis était parmi eux. Le jugement fut expéditif : Ils furent tous condamnés à être roués vifs. On les jeta dans une geôle sombre et humide dans l’attente de leur châtiment. La veille de leur exécution, Hélène eut l’autorisation de rendre une dernière visite à son fiancé.
Le lendemain, lorsque Francis monta sur l’échafaud, on découvrit que sa place avait été prise par une frêle jeune fille : c’était Hélène qui s’était sacrifiée pour sauver son fiancé. La foule cria grâce, et la demande fut entendue. La jeune fille fut graciée, mais condamnée aux galères à perpétuité et elle fut marquée au fer, du lys royal. Quant à Francis, il pu fuir en Angleterre où il se maria avec une vieille Anglaise acariâtre et mourut de vieillesse. Depuis cette histoire, la baie où s'ouvre la grotte s'appelle anso de l'Argen Faous.

Le sacrifice des soldats d'Antibes

La douceur de la vie antiboise a parfois laissé place a la plus profonde douleur. En 1536 du duc de Milan François Ier (1494-1547) réclama l’héritage du duché de Milan. Il envoya une armée de 40 000 hommes occuper la Savoie et le Piémont. Charles Quint, alors allié du duc de Savoie, ne pouvait en supporter plus. Il leva une armée de 100 000 hommes qui se dirigea vers la Provence. 
C’est à ce moment là que se situe l’épisode antibois. A l’annonce de l’invasion imminente de la Provence par les troupes de Charles-Quint, la ville se mit en état de défense. On plaça des gardes en permanence à la porte du Révely et à la porte de l’Orme. On fit des réserves de vivres. On mit à l’abri les archives de la ville, la grande croix et le buste en argent de Saint Sébastien. Le 17 juin on fit fermer les portes. Début juillet, la tension monta encore quand on apprit que Don Fernand de Gonzague s’approchait de la ville à la tête de 3.000 cavaliers et 101 pièces d’artillerie, accompagné par 10.000 fantassins Espagnols et 1.500 Italiens ; 4.000 allemands constituant l’avant-garde.
Mi-juillet, cinq galères commandées par Andréa Doria se présentèrent devant la ville. Deux bombardes firent feu et coulèrent deux galères. Malgré cet exploit, la ville fut prise d’assaut le 17 juillet 1536 et fut pillée. Profitant de la confusion, Gaspard de Grimaldi réussit à sortir de la ville avec sa troupe et prit la direction de Grasse. C’est à ce moment que se situe un épisode qui marquera l’histoire antiboise.
Bien que les faits exacts soient controversés, on sait qu’une bande d’une trentaine de légionnaires provençaux commandés par Raphaël Roux de Cormis (de Courmes), gouverneur de Saint-Paul de Vence depuis 1525, colonel des légionnaires de Provence, âgé au moment des faits de quatre vingt deux ans (?), issu de l’illustre famille des seigneurs de Courmes, s’attaqua à une colonne de soldats à pieds espagnols. Malgré leur courage, ils furent mis en déroute par les arquebuses espagnoles (18 juillet 1536). Roux de Cormis mourut dans cet engagement, les armes à la main selon la légende, en refusant de se rendre.
Cette histoire fait partie du patrimoine antibois, mais l’honnêteté nous oblige à dire que l’héroïsme de Raphaël Roux de Cormis est sujet à caution. Dans le Dictionnaire de la Provence et du Comté-Venaissin, l’auteur, Claude-François Achard, rapporte que Pierre-Joseph de Haitze « assure que ce combat fut aussi chimérique que la bravoure de Raphaël de Cormis ». Il accuse même un de ses descendants, Louis de Cormis, d’avoir, sous le nom d’emprunt de Pierre d’Hozier, falsifié de nombreux documents pour avaliser cette légende et donner à leur famille une grandeur usurpée.
A l’appui de cette thèse, on peut ajouter que la base des Chevaliers des Ordres Royaux mentionne en ce qui concerne Raphaël de Cormis : « Dit le capitaine Bouvet, colonel de 6000 légionnaires; mort en 1536. Gentilhomme décoré de l’ordre de Saint Michel, sans garantie (faute de témoignage ». Il faut préciser également que les campagnes auxquelles aurait héroïquement participé Raphaël de Cormis ont été rapportées par son fils Pierre. On le voit ainsi commencer à guerroyer en 1470, participer à dix batailles rangées, à cent petits combats, à cinquante sièges. Fait étonnant, à 77 ans, il est nommé à la tête de 2.000 légionnaires provençaux, se retrouve à Fossano, se repli sur la Provence où il est chargé de harceler les ennemis, sauva Vence et Saint-Paul, puis se précipita vers Antibes où il attaqua les Espagnols et mourut l’épée à la main. Quelle énergie pour cet homme de 82 (ou 84 ans, l’âge est incertain) vivant au XVIe siècle !Mais l'histoire, la grande histoire, quand elle n'est pas assez belle, peut se transformer en roman.

Le monument des Âmes-du-Purgatoire vers 1930. Photo Biondo.

Le siĂšge d'Antibes (1746-1747).

Nous sommes en pleine guerre de succession d'Autriche opposant d'un côté la Prusse, la Bavière, l'Espagne et la France et de l'autre, la Grande-Bretagne, l'Autriche, les Pays-Bas et la Russie.

Alors qu'en Italie, les armées françaises subissent des revers (défaite de Plaisance le 16 juin 1746), une armée austro-piémontaise de 50 000 hommes franchit le Var, soutenue par une importante flotte anglaise. La place-forte d'Antibes défendue par mille six cents hommes commandés par le comte de Sade, se trouve face à cette armée. Malgré les ultimatums, la ville refuse de se rendre.

Le 19 décembre à 14 heures, les hostilités commencèrent par un bombardement incessant à partir de galiotes à bombes (ou bombardes), mouillant dans la rade du Golfe-Juan. Le tir était dirigé sur la poudrière Saint-André par un poste établi sur le plateau de Notre-Dame de la Garde.
Le 26 à 11 heures, trois officiers se présentèrent, porteurs d’une sommation adressée au comte de Sade. Celui-ci les reçut courtoisement, mais rejeta vertement l’ultimatum en déclarant « Sa Majesté m'aïant fait l’honneur de me confier cette place, au déshonneur de la rendre, je préférait infiniment mieux la gloire d’être enseveli sous ses ruines. »

Le bombardement reprit alors, soutenu par des batteries autrichiennes installées sur les hauteurs dominant Antibes, en ce lieu que l’on appellera plus tard « Plateau des Autrichiens », démolissant plus de cent maisons. Le bombardement fut interrompu pendant la journée du 31 décembre, mais reprit de plus belle le lendemain.
L’ennemi fit alors le projet d’installer une batterie sur les hauteurs d’Entrevignes qui formaient une butte dénommée « butte du Procureur du Roi », se situant au niveau du carrefour actuel entre la route de Nice et l’avenue Philippe Rochat. Heureusement il n’eut pas le temps de mettre ses projets à exécution, car, le 23 janvier 1747, les assiégeants finirent par lever précipitamment le siège à l’annonce de l’arrivée des troupes franco-espagnoles du maréchal de Belle-Isle et du marquis de La Mina, et ils repassèrent le Var le 3 février.
La ville était victorieuse mais ruinée. Elle avait reçu près de 2600 bombes, 200 pots à feu ; 200 maisons sont entièrement détruites ; les campagnes sont ravagées ; les soldats ennemis ont coupé orangers, vignes et oliviers. Monsieur de Belle-Isle s’engagea auprès du maire, d’intercéder auprès du roi afin que la ville, du fait de sa bravoure et des grands dommages subis, puisse obtenir un juste dédommagement. 

Plan du siège de 1746.

Boulet du siège de 1746, comme l'indique la date, enchâssé dans la façade latérale de la chapelle de la Garoupe. Photo Pierre Magherini.

Bonaparte au Fort-Carré.

Bonaparte fut-il réellement incarcéré au Fort Carré ou fut-il simplement mis aux arrêts de rigueur à son domicile niçois ? Les faits semblent aller dans le sens de la seconde hypothèse. A la suite du coup d’état du 9 thermidor de l’an II (27 juillet 1794) qui vit l’exécution de Robespierre et de ses amis, Bonaparte fut inquiété en raison de ses amitiés avec Robespierre le Jeune, qui était alors commissaire aux armées. Nous nous référerons à la remarquable étude faite par Jacques Boissier.
Bonaparte se trouvait au camp de Siga, entre Levens et Saint-Blaise, lorsqu’il apprit, le 5 août, les évènements qui s’étaient passés à Paris. Le 6 août Les représentants du comité de salut public Albitte, Laporte et Salicetti rendirent un arrêté suspendant le général de ses fonctions et prévoyant de l’envoyer à Paris afin qu’il comparaisse devant le Comité de Salut Public. Le 22 thermidor (9 août) Bonaparte se rendit à Antibes pour faire disparaître quelques papiers compromettants. C’est là qu’il fut arrêté et accusé de trahison et de corruption. On l’aurait alors ramené sous escorte au Palais Laurenti (actuellement au 6 de la rue Bonaparte à Nice) où il aurait été mis aux arrêts de rigueur.
Le comte Laurenti, qui le logeait et l’appréciait, lui fit promettre de ne pas s’enfuir, et en échange, il interviendrait en sa faveur auprès de Salicetti à qui il avait rendu un service dans le passé. L’intervention dut être efficace puisque le 3 fructidor (20 août), Bonaparte était mis en liberté provisoire. Mais des ordres contradictoires arrivèrent de Paris, et il fut à nouveau arrêté et transféré au Fort Carré pour y être interrogé. En septembre, le jeune général rejoignait le quartier général de l’armée d’Italie commandée par le vieux général Dumerbion. Ce dernier, perclus de goutte, obligé de garder le lit, chargea Bonaparte d’établir un plan afin d’attaquer le Piémont. La carrière du grand chef de guerre commençait.
On ne peut affirmer où se trouve la vérité : arrêts de rigueur à Nice ou enfermement à Antibes ? Ceux qui se sont plongés dans les archives n’ont trouvé aucun document évoquant une incarcération de Bonaparte au Fort Carré. Masséna aurait déclaré que Napoléon ne serait resté que peu de temps au Fort Carré pour un simple interrogatoire. Le seul élément certain est que, le 20 août, date de sa libération, il était à Antibes, au Château Salé. Mais, dans le Mémorial de Sainte Hélène, cet épisode n’est même pas évoqué. 
Certains soutiennent l’idée que ce serait Napoléon III qui aurait demandé que l’on fasse disparaître ces documents pour ne pas ternir l’image du général glorieux. Pourtant quelle plus belle image aurait-on pu donner de cet officier jeune et vertueux, incarcéré sur ordre de politiciens corrompus! Il faut rappeler que le dénommé Laporte, un de ses accusateurs, fut lui-même convaincu d’avoir détourné des fonds destinés à l’armée. 
Malgré tout cela, il est certain que l’on continuera  de visiter la cellule que Bonaparte a occupée lors de sa détention au Fort Carré. L’histoire a toujours eu besoin de légendes et les Nations de mythes.

Bonaparte dans sa cellule au Fort-Carré d'Antibes

Napoléon fait son entré (sic) dans la ville d'Antibes. Collection M. Moréna

Image de propagande car l'Empereur n'est jamais entré dans la ville.

Napoléon devant Antibes.

Quand Napoléon débarqua au Golfe-Juan le 1er mars 1815, il souhaitait frapper les esprits en s’emparant d’Antibes, bien que, et l’avenir le montrera, cette ville n’était pas essentielle à la poursuite de sa marche sur Paris.
A Antibes, se trouvait le 106e régiment d’infanterie de ligne réputé bonapartiste et commandé par le colonel Poudret de Sevret, un fidèle de l’empereur.
Si Antibes valait bien un détour, elle ne valait certainement pas une bataille. Napoléon résolut donc d’y envoyer un premier émissaire, le capitaine Bertrand qui précédait un détachement commandé par le chef de bataillon Lamouret secondé par le lieutenant Thibault, et constitué par le sergent Blamont, les caporaux Labory et Richard, dix-sept grenadiers et le tambour Voland. Leur but était de fraterniser avec la garnison et transmettre des lettres à deux destinataires ciblés : le général Corsin, que Napoléon avait fait baron d’Empire et qui commandait l’arrondissement d’Antibes, et le colonel Paulin, directeur des fortifications, qui avait servi loyalement sous les ordres du général Bertrand.
Malheureusement, le colonel Poudret de Sevret était en congé à Paris ; Corsin et Paulin étaient partis pique-niquer sur l’île Sainte Marguerite. La place était alors commandée par le major Cuneo d’Ornano, un ajaccien, mais qui, avec tous les officiers de la place, avait fait serment de fidélité au roi. D’autre part, l’ensemble du conseil municipal était favorable aux Bourbons et soutenu par la population. Voulant éviter tout affrontement, on laissa pénétrer le détachement dans la ville, puis on referma les portes derrière eux, ce qui les prit au piège. On les désarma, sauf les officiers qui purent garder leur épée, et on les conduisit dans une maison de la rue des casemates « où se réunissaient les francs-maçons » (voir Casemates).
D’autres émissaires envoyés par Napoléon se succédèrent. Un chirurgien, Augustin Muraour, chercha à s’introduire secrètement dans la ville. Il fut également arrêté. Les capitaines Peretti et Casabianca, corses tous deux, cherchèrent à entrer en contact avec Cunéo ; ils furent également arrêtés, mais Peretti réussit à s’enfuir. Tous les officiers se retrouvèrent aux arrêts, dans la maison rue des casemates. Il s’agissait du capitaine Antoine Lamouret, du capitaine Bertrand, du lieutenant Jules Thibault, du capitaine Jacques Casabianca et du chirurgien Augustin Muraour. Quant aux grenadiers, ils furent enfermés dans la chapelle Saint-Esprit.
Le conseil municipal, alors dirigé par le notaire Emmanuel Olivier (voir ce nom), maire par intérim, et par le médecin Arnoux fit sonner le tocsin et envoya des messagers aux communes voisines, leur demandant de résister à «l’ennemi de la tranquillité publique et de la France.» Quant à Napoléon, il prit la route de Paris sans plus se soucier de la ville d’Antibes.
Dans la nuit du 3 au 4 mars 1815, les officiers enfermés dans la maison de la rue des casemates tentèrent de s’évader. Ils enfoncèrent la porte et se précipitèrent au dehors en bousculant le soldat de garde. Celui-ci eut le temps de tirer un coup de fusil, ce qui donna l’alarme. Quatre évadés furent rapidement repris. Le cinquième, le capitaine Jacques Casabianca, réussit à sauter par une embrasure du bastion de la marine, mais en chutant il se blessa sérieusement au dos et fut transporté à l’hôpital.

Lorsque, cent jours plus tard, le roi Louis XVIII retrouva son trône, il voulut récompenser la ville qui lui était restée fidèle. Il lui restitua le titre de «bonne ville» qui lui avait été retiré par Napoléon et il lui accorda l’autorisation d’ajouter à son blason une bannière portant la devise : Fidei servandae exemplum  ce qui se traduit par : Un exemple de serment respecté.

Bientôt nous reverrons la France

Ile d'Elbe, février 1815.

Blog "L'Estafette".

Débarquement au Golfe-Juan

Bibliothèque Nationale

L'épopée du sous-marin "Unbroken"

Ce bâtiment de la Royal Navy faisait partie d’une classe de 49 petits sous-marins dite U-class dont les caractéristiques étaient : 61 mètres de long, 4 m 85 mètres de large et 3 m 90 de haut. Il était animé par 2 moteurs diesel de 615 cv assistés de deux moteurs électriques de 825 cv. Il avait un équipage de 31 hommes et était armé de 4 tubes lance-torpille, de trois mitrailleuses Vickers et d’un canon de 3’. 
Il fut lancé le 4 novembre 1941 et rejoignit la 10e flotte basée à Malte d’où il participa à de nombreuses missions en Méditerranée. C’est à ce titre que dans la nuit du 20 au 21 avril 1942 (opération Delay II), venant de Gibraltar, il fut amené à débarquer sur la côte antiboise le capitaine Peter Churchill agent du Special Operations Executive (SOE) qui accompagnait deux radio-opérateurs également membres du SOE : Isidore Newman dit « Julien » pour le réseau « Urchin » dirigé par Francis Basin, et Edward Zeff alias « Mathieu » pour le réseau « Spruce » de Georges Duboudin, qu’il accompagna en ville jusqu’à leur « planque » située dans la maison du Docteur Louis Levy (voir dans la rubrique Personnages historiques) au 31 avenue du Il y retrouva Emmanuel d’Astier de la Vigerie alias « Bernard », qui avait fondé à Cannes un mouvement destiné à organiser des sabotages, « La Dernière Colonne », qui repartit avec lui pour Gibraltar d’où d’Astier put gagner Londres où il rencontra le général de Gaulle. 
L’Unbroken rejoignit l’Angleterre en décembre 1943. Le 26 juin 1944 il fut loué à la marine soviétique avec un certain nombre d’autres unités des flottes américaines et britanniques. L’Union Soviétique restitua l’ensemble des vaisseaux loués en 1949, lorsque lui fut transféré une partie des unités de la flotte italienne. Le vieux sous-marin fut alors désarmé et démantelé en 1950.

La stèle du sous-marin "Unbroken" à l'Ilet

Le sous-marin "Unbroken".