Antibes historique
C'est le monument le plus emblématique de la ville d'Antibes. Que serait la ville sans cette silhouette familière; que serait ce port sans ce gardien silencieux mais attentif. Autrefois, il était même la "carte d'identité" de la ville resserrée derrière ses murailles. Ainsi, Léo Watripon, dans son Guide du Cap et de la ville d'Antibes paru en 1868 écrivait: En venant de Nice, on aperçoit une citadelle : "Cocher, est-ce là Antibes ?" - "Non, monsieur, c'est le Fort Carré". Puis, on laisse à gauche une espèce de porte, la voiture file et les yeux, à force de chercher Antibes, finissent par découvrir Cannes. En retournant, on laisse à droite la même sorte de porte, puis on aperçoit de nouveau la citadelle : "Cocher, où est donc Antibes ?" - " Monsieur, nous l'avons passée". On peut comprendre aujourd'hui pourquoi les Antibois ont voté pour la destruction de leur corset de pierres.
Le fort a donc été construit sur une éminence rocheuse dominant l'anse Saint-Roch. Le site d'Antibes a la caractéristique de présenter une suite d'éminences rocheuses procurant protection et zone d'habitat. On trouve successivement du nord au sud : le rocher du Fort-Carré, l'îlot Saint-Jaume, l'îlot Sainte Claire, l'acropole antiboise, le Castelet, la pointe des Pendus.
Plan de la ville montrant les 6 îlots rocheux et indiquant la présence de la Tour Saint-Jaume datant du milieu du XVIe siècle, et de la chapelle Sainte-Claire construite au XVe siècle. Ces deux monuments ont disparu au fil des travaux de transformation de l'anse Saint-Roch, notamment lors de la construction du môle du port et de la demi-lune Saint-Jaume. En bas de l'image se trouve la chapelle Saint-Roch. A noter sur la droite, le ruisseau Laval que l'on franchit par le "Ponteilh".
Archives municipales, 50Fi5
Le Fort Carré au XIXe siècle
Avant le fort, il y avait donc un îlot rocheux dominant d'une hauteur de 26 mètres l'anse Saint-Roch, et séparé du rivage par un goulet qui peu à peu s'est comblé sous l'effet du dépôt des sables amenés par la mer. Toutes les civilisations ont le besoin d'occuper les positions hautes pour en faire des lieux sacrés. Ainsi, après les Grecs, les Romains y installèrent un temple qui, selon la loi immuable du droit du vainqueur, fut remplacé par une église primitive chrétienne : l'église Saint Michel. Elle fut ensuite remplacée par la chapelle Saint Laurent qui, projet militaire oblige, fut transformée en tour de guet au début du XVe siècle : la tour Saint Laurent. Celle-ci, encore bien visible sur les images aériennes du Fort Carré, a peu à peu disparu derrière les quatre bastions à angle saillant que nous voyons aujourd'hui, édifiés sous la direction de l'ingénieur Henri de Mandon, et qui portent des noms donnés par leur orientation: Bastion France (ouest), Bastion Nice (nord), Bastion Corse (est) et Bastion Antibes (sud).
Le bâtiment respecte les éléments des constructions provençales: murs en pierres calcaires et couverture en terre cuite. Les eaux de pluie, précieuses dans notre région, sont récupérées par une grille située au milieu de la cour centrale, puis filtrées et envoyées vers la citerne d'où elles peuvent être récupérées par un puits. Le fort est équipé pour soutenir un siège : il possède, en dehors des casernements et de ses 18 canons, un four à pain, un magasin de vivres, une chapelle, une prison.
Les rois qui se succèderont apporteront des améliorations au système défensif de la ville. Le fort subira de nombreuses améliorations en fonction de l'évolution de l'ingénierie militaire. Vauban visita le site vers 1680, et établit un liste des travaux à effectuer afin de renforcer ses fonctions défensives. l'accomplissement de ce chantier fut confié à l'ingénieur Niquet qui dirigea également le "creusage du port". Mais, certaines des améliorations prévues par Vauban, ne furent pas réalisées en raison du coût financier excessif.
En 1860, lorsque les terres du comté de Nice rejoignirent la France, Antibes perdit sa position stratégique, et le Fort Carré son importance défensive. Déclassé en 1860, il servira de caserne jusqu'en 1967, date à laquelle il sera cédé au Ministère de la Ville, de la jeunesse et des sports. L'édifice sera acheté par la ville d'Antibes en 1997
Un stade sera construit à ses pieds en 1920. Il pourra accueillir un match de la Coupe du monde de football : le 12 juin 1938, la Suède et Cuba se sont affronté ici en quart de finale.
Aujourd'hui, le Fort Carré est devenu un lieu touristique très prisé. Il a été restauré entre 1979 et 1985 par les membres bénévoles du Club du Vieux Manoir. Il est classé au titre des monuments historiques. Il est ouvert au public depuis 1998. Des visites guidées sont organisées.
Un sentier permet de faire le tour de la presqu'ile et donne de belles vues à la fois sur la vieille ville, le Port et le Fort.
Plan des fortifications d'Antibes en 1700. Archives municipales.